WOVENHAND – L’Epicerie Moderne (Feyzin) – 30.05.2014

10364217_771472426210287_1737264396043935434_nMême lieu, même mois, cinq ans auparavant. Je découvre sur scène ce qui se révèlera comme l’une des plus grosses claques de ma vie : un power trio mené par un chaman à bandana complètement possédé. En totale introspection spirituelle, les miches clouées sur son tabouret, les yeux révulsés et les jambes secouées de spasmes. Dès les premières mesures, je comprends que je suis en train de vivre un grand moment et je voudrais qu’il ne se termine jamais… Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et je n’ai alors qu’une hâte : renouveler l’expérience.

Après cinq années d’impatience, je m’apprête de nouveau à assister à la grand-messe de monseigneur David Eugene Edwards. Chapeau à plumes vissé sur sa chevelure blonde comme les blés du Colorado, regard intense et même large sourire durant quelques instants furtifs, DEE semble désormais plus ouvert au public. Il se tient à présent debout, droit dans ses bottes de cowboy, et son jeu de scène réside essentiellement dans d’étranges mouvements de bras. Depuis quelques temps, le line up aussi s’est trouvé bouleversé, l’excellent bassiste Pascal Humbert ayant, notamment, tiré sa révérence quelques années auparavant pour se consacrer à d’autres projets. Mais le prédicateur Edwards sait s’entourer, et c’est maintenant accompagné de trois talentueux disciples qu’il arpente les planches et investit les studios.

Tombé dans la marmite spirituelle quand il était petit, DEE nous livre son prêche musical, tel un élu de Dieu, avec une intensité rare et convaincante. Oscillant entre la beauté céleste et la terre des natifs, la musique de Wovenhand ne touche pas seulement les esprits illuminés, mais parvient également à prendre aux tripes les plus mécréants d’entre nous. On en deviendrait presque croyant ! Le groupe, apparemment plus combatif que jamais, nous livre ce soir un set carrément plus couillu que le précédent, sans pour autant tomber dans la caricature, le tout restant empreint du même mysticisme. Plus pêchus et parfois même un peu craspouilles niveau son, la plupart des morceaux sont balancés à grand renfort de blues-punk musclé, et côtoient tout de même quelques ballades dark-country et incantations ensorcelantes. Tous sont extraits d’albums récents (The Laughing Stalk, Refractory Obdurate), à l’exception du fracassant « Kicking Bird » final. Tambourinant ses fûts façon tribale ou caressant subtilement ses cymbales aux maillets, le batteur transcende la foule de ses rythmiques à la fois primitives et élaborées, alors que la basse et la guitare rythmique se lancent dans des assauts fougueux. Et de ce tonnerre divin se détachent tour à tour les slides et la mandoline de David Eugene Edwards, et sa voix singulière s’élève, habitée par le feu sacré.

Le genre de spectacle dont on ne sort pas indemne. Difficile, en effet, de se remettre de tant de ferveur, rares sont les artistes qui se donnent corps et âme à leur public avec une telle passion. Assister à un concert de Wovenhand est une expérience unique et marquante, entre l’exorcisme chrétien et la cérémonie chamane sous peyotl. Devant tant de talent, et tout agnostique que je suis, je tiens tout de même à dire Amen !

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