THE CURE, Faith

THE CURE
Faith
1981
Royaume-Uni
Cold wave

01. The Holy Hour
02. Primary
03. Other Voices
04. All Cats Are Grey
05. The Funeral Party
06. Doubt
07. The Drowning Man
08. Faith

« All Cats Are Grey »… Le gris, le gris, le gris ! Humeur, couleur évidente de cet album. Un gris dépressif comme seule l’Angleterre peut en produire, avec ses fumées d’usines, ses briques vieillottes. L’heure n’est pas franchement à la rigolade. Les volutes tristes laissent planer des fantômes (cris lointains sur « Other Voices », « The Drowning Man », spectre d’Ian Curtis à tous les étages). En effet, les Cure reprennent à leur sauce les ficelles initiées par Joy Division. « Vague froide » en français dans le texte… Neurasthénie communicative, mais qui n’atteint pas l’étouffement claustrophobique de Pornography, successeur de Faith et épilogue de la « trilogie noire ». Frissons, obsessions existentialistes et romantiques, plaintes réfrigérantes, Robert Smith impose son style gothique, avec des références littéraires de choix ; il évoque ici Mervyn Peake (auteur de Gormenghast) sur « The Drowning Man ». Variations de morceaux lents et pesants (les plus réussis) et rapides (« Primary » et « Doubt », héritage punk avarié). Les Cure ne sont jamais aussi bons que quand ils prennent le temps de poser des atmosphères. J’en arrive ainsi à « The Funeral Party »… Inclus au coeur de l’album, c’est mon titre préféré de l’ensemble de la discographie du groupe de Crawley. Beauté intemporelle. Douceur mortifère, comme lors d’une overdose de morphine. Le morceau cloue littéralement. La voix de Smith n’a jamais été aussi expressive. C’est intense. Menée tout le long par des nappes de clavier, la chanson s’unit sur un rythme monotone et paresseux, et puis les battements s’éteignent peu à peu. On plonge dans la fosse, on prend l’eau. C’est triste et agréable à la fois. Des adieux sans douleur. Le groupe chante le mal de vivre de cette Angleterre thatchérienne. Il est encore loin de la Curemania, du maquillage dégoulinant, des cheveux hirsutes, mais il s’impose dans le paysage post-punk. Les Cure voguent sur une identité musicale nouvelle : claire-obscure (cf. la pochette énigmatique du disque), avec ses esprits chagrins ; la vague macabre ne fait que commencer. On compte parmi leurs compagnons de route, des formations tout aussi torturées, telles que Bauhaus, Virgin Prunes, Siouxsie and the Banshees, ou aux Etats-Unis, les infâmes Christian Death. Mais The Cure n’aura de cesse de se réinventer au fil des ans. Faith exprime les tourments de jeunes consciences éreintées par l’ennui à travers son ambiance calme et inquiète à la fois.

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